Paroles :Léo FERRÉ

Musique :Léo FERRÉ

 

Monsieur mon passé

 

J’ai dans la tête un vieux banjo

De mille-neuf- cent-vingt-cinq

Un vieux banjo qui s’grattait l’dos

En regardant Chaplin

Dans un cinoche

Où y’avait d’la brebis

Qui s’effiloche

Dans les fouilles à sam’di

Ce banjo-là

Donnait le la

De mille-neuf- cent-vingt-cinq

Mais ce la-là

N’était plus là

Y’avait même plus Chaplin

Dans l’vieux ciné

Où j’suis r’passé

Comme les souv’nirs

Qui veulent rien dire

Comme disait rien

L’ciné muet

Qui est comme les chiens

Mais qui causait

 

REFRAIN

Monsieur mon passé

Voulez-vous passer

J’ai comme une envie

D’oublier ma vie

Si j’avais à faire

Ma vie à l’envers

C’est vous mon passé

Qui m’verriez r’passer

 

J’ai dans la tête un vieux guignol

De mille-neuf- cent-vingt-cinq

Un vieux guignol où pour deux sols

On jouait des tas d’machins

Dans un trucmuche

Où y’avait pas d’vertu

Et d’la paluche

En voilà en veux-tu

Ce vieux guignol où ma parole

En mille-neuf- cent-vingt-cinq

On f’sait joujou à l’entresol

Histoire de prend’ du grain

A disparu

Au fond d’ma rue

Comme disparaît

Tout mon passé

Comme passent hélas

Les vieilles passions

Pour faire la place

À ma chanson

 

REFRAIN

Monsieur mon passé

Laissz-moi passer

J’ai comme un rencart

Qui me rend bizarre

Comme les gens pressés

Qui veulent pas causer

Pour pas faire d’histoires

On changera d’trottoir

 

J’ai dans la tête un "je n’sais plus"

De mille-neuf- cent-vingt-cinq

Un "je n’sais plus" qui continue

A faire tourner l’moulin

Dans l’bric-à-brac

Où s’fabriquent les idées

Qui font des couacs

Chaque fois qu’on  veut s’rapp’ler

Ce "je n’sais plus" qui vous a plu

En mille-neuf- cent-vingt-cinq

Et qui n’est plus qu’une fleur perdue

Parmi les tas d’chagrins

D’un vieux passé

Qu’est pas passé

Malgré l’banjo

Qui s’grattait l’dos

Et puis l’guignol

Où ma parole

On v’nait paumer

Nos belles années

 

REFRAIN

Monsieur mon passé

Faudrait bien passer

J’ai comme une envie

D’aller faire ma vie

Guignol ou banjo

J’te f’rais bien la peau

J’suis p’têt’ qu’une cigale

Mais j’t’emmène au bal